Récits de colons


Auguste Wahlen "Moeurs, usages et coutumes de tous les peuples du monde"


La côte des esclaves comprend les états de Coto, Popo-Ouyda et Ardra, qui n'ont rien d'assez important pour nous arrêter ; ils dépendent tous du royaume de Dahomey, dont le chef, du rang d'un petit cabossier, s'est élevé à celui d'un grand monarque africain. Ce roi peut armer 8000 hommes, mais entouré d'ennemis, il serait promptement détrôné s'il n'était soutenu par les forts européens. 

Le roi à deux palais qui se composent de chaumières distinguées, enfermées par des murs de terre dans un enclos d'un quart de lieue, où sont logées 800 à 1000 femmes, lesquelles, armées de fusils ou de flèches, forment la garde légère du souverain, qui choisit dans ce corps ces aides de camp et les messagers de ses ordres. 

Objet Vaudou

Le despotisme et la férocité de ses monarques sont hors de toute expression : les ministres ne peuvent les approcher qu'après avoir déposé à la porte leurs vêtements de soie, et en rampant ventre à terre et roulant leur tête dans la poussière. Un gouverneur anglais, M. Dalzel, trouva le chemin de la cabane du roi semé de crânes humains, et les murs incrustés de mâchoires.


Amazones du Dahomey

Le roi marche en cérémonie sur les têtes sanglantes des princes qu'il a vaincus ou des ministres qui sont tombés en disgrâce. A la fête des tribus, où tous les sujets apportent leurs dons, il arrose de sang humain le tombeau de ces ancêtres : 50 cadavres sont jetés autour du sépulcre royal, et les têtes fixées sur autant de pieux. 

Dans les constructions élevées en son honneur, on mêle le sang à l'argile ; les veuves royales se tuent les unes les autres jusqu'à ce que le successeur du défunt mette un terme au massacre. Le peuple applaudit à ces cruelles scènes et déchire les victimes en s'abstenant pourtant de dévorer leur chair. L'objet de leur culte est un léopard. Ce peuple se distingue des autres nègres de la Guinée par ses moeurs féroces et perfides, et par son amour implacable de la vengeance. La distinction nationale des Dahomeys consiste en une ligne qui descend du haut du front à la racine du nez. Les femmes sont réduites à une condition abjecte ; elle ne se présente devant leur mari qu'en témoignant la soumission la plus servile, et se mettent à genoux pour leur offrir leur nourriture. Ces femmes passent pour fort jolies. 


Femmes sauvages du Dahomey : le corps des Amazones



Jacques Grâce de Saint-Sauveur

Encyclopédie des voyages 


Habitant du royaume de Bénin. La pluralité des femmes est en usage dans ce pays : et leur nombre n'a de règles que le caprice, ou les facultés du mari. Un mari qui a convaincu sa femme d'adultère, peut lui faire donner la bastonnade, et la chasser de sa maison. Il acquiert un droit réel sur tous les biens de celui qui a été le complice de ce crime.


Les seigneurs de la cour se vengent par leurs mains ; lorsqu'il surprennent leurs femmes dans une galanterie, après avoir poignardé les deux coupables, ils abandonnent leur corps aux bêtes farouches. Quoi que ce peuple fasse un très grand commerce d'esclaves, il ne l'entretient cependant pas aux dépens de sa nombreuse population : ce sont des nègres de l'intérieur des terres qu'il vend aux Européens. Le Béninois se dit esclave de l'État ; mais réellement il est libre, et celui qui pour crime est condamné à l'esclavage, ne peut être vendu pour le transport. Néanmoins, il est permis aux hommes de se débarrasser de leurs femmes par cette voie. Ces nègres reconnaissent un Dieu créateur, auquel il ne rende aucun culte : il le croient immatériel et tout-puissant, mais ils sacrifient au diable, pour l'empêcher de leur faire du mal. Ils ont plusieurs idoles qu'ils appellent fétiches. La circoncision y est en usage. 

Le pays est bon, couvert de bois, et traversé par des rivières et des étangs ; mais il y a des endroits qui manquent d'eau. On n'y trouve beaucoup de bêtes féroces ; éléphants, tigres et léopards. On n'y trouve aussi des cerfs, des sangliers, des singes, des chevaux, des ânes, des lièvres, des brebis, et toutes sortes d'oiseaux.


Les Douze Rois d'Abomey (collage de photos)

Journal de médecine
de chirurgie et de pharmacologie
Archives médicales de la marine
Revue de thérapie médico-chirurgicales

Mariages consanguins dans la race noire. En 1849 mourait à Wildah (Ouidah) un traitant portugais nommé Da Souza. Personnage important dans le pays qui l'habitait depuis de longues années, Da Souza avait acquis une grande fortune dans la traite des nègres. À sa mort, il laissait après lui une centaine d'enfants issus de 400 femmes enfermées dans son harem. La politique ombrageuse des rois du Dahomey, hostile à l'établissement d'une race métisse, a parqué cette nombreuse progéniture dans une enceinte particulière (Salam), sous l'autorité d'un des fils de Da Souza. 
Mal vus dans le pays, surveillés par les agents du roi, le plus despotique de tous les monarques de la terre, ces métisses ne peuvent s'unir qu'entre eux, ou, pour mieux dire, ils vivent dans la plus honteuse promiscuité. En 1863, on comptait les enfants de la troisième génération ; la couleur de leur peau revenait rapidement au noir foncé, tout en conservant quelques-uns des traits de l'européen, leur ancêtre. Nous avons pu constater par nous-mêmes que, parmi tous ces descendants de la Souza, formant entre eux des unions au degré de parenté les plus proches et les plus monstrueux même, il n'y avait ni sourds-muets, ni aveugles, ni crétins, ni infirmes de naissance ; en revanche, ce troupeau humain va en décroissant et il est menacé d'une extinction prochaine. 


Alexis Favre
Funérailles des sépultures
Histoire des inhumations chez les peuples
anciens et modernes

Au Bénin les funérailles sont sanglantes ; les grands personnages y sont toujours enterrés avec 30 ou 40 esclaves que l'on égorge sur leur tombeau. Ces horribles sacrifices sont bien plus considérables lorsqu'il s'agit d'un chef. Dès que le roi a rendu le dernier soupir, on creuse auprès du palais une fausse large, profondes et à ouverture très étroite. Une pierre de 1 m de large (3 pieds) et de 1 m 60 de long (5 pieds) suffit pour la fermer. Aussitôt que son corps y a été descendu, tous ces serviteurs, hommes et femmes, entourent la fosse et se disputent l'honneur d'y être enterrés vivants. On précipite alors les plus dignes de cette funeste préférence et on ferme le tombeau.


Le lendemain et les jours suivants, on vient soulever la pierre et l'on demande aux victimes si elles ont vu le Roi. Les plaintes et les cris qui se font entendre et que l'on écoute point, témoignent du regret qu'elles ont de s'être ainsi sacrifiées. 


Ces visites journalières ne cessent que lorsque l'on entend plus de bruit, preuve que toutes les personnes sont réellement mortes et ont retrouvé leurs droits pour l'accompagner dans son voyage.

On se livre alors à la joie et aux libations ; les ivrognes parcourent la ville, égorgent ce qu'il rencontrent, homme et animaux, et les jettent dans le tombeau du souverain.